La médiation culturelle adaptée

Les publics empêchés sont confrontés quotidiennement à de nombreuses difficultés. La naissance d’organismes visant à permettre à ces populations d’accéder de manière appropriée à la culture et aux connaissances est un grand pas en avant vers l’égalité citoyenne. De quelles façons ces institutions parviennent – elles à atteindre leurs objectifs?

C’est dans le cadre de la visite du Centre Ressources Autismes (CRA) que nous proposons cet article dédié à la médiation culturelle adaptée. Le CRA et ses animateurs sont entraînés à accueillir un public autiste et à transmettre à un public empêché des ressources et informations leur permettant d’exercer au mieux leur citoyenneté. Vous aurez plus de détails sur l’institution ici.

La médiation est le fait de servir d’intermédiaire, en particulier dans la communication. Dans le cadre de la médiation culturelle, un professionnel de l’information servira d’intermédiaire entre les connaissances culturelles et scientifiques et les usagers (1).

“La médiation culturelle adaptée est un ensemble d’outils et de moyens humains facilitant l’accessibilité à la culture pour les personnes en situation de handicap. Elle permet de faire le lien entre le public et les œuvres culturelles ou artistiques, en s’adaptant aux capacités de chacun.” (2)

La loi française du 11 février 2005, plus communément appelée “loi handicap”, a pour objectif de permettre aux personnes atteintes d’un handicap de participer à la culture et à la citoyenneté (3). De ce fait, il est important que divers organismes puissent satisfaire les besoins de ces populations sans aucune discrimination.

C’est pour cette raison que la médiation culturelle adaptée représente un enjeu de taille pour les professionnels de l’information. En effet, le but principal d’un professionnel de l’information est de faciliter la transmission des savoirs au plus grand nombre possible. Cela va donc de soi que divers moyens aient été mis en place pour permettre au public empêché de jouir des mêmes droits que le reste de la population. Cependant, les médiateurs se doivent d’être des professionnels formés à traiter avec ce type de public, leurs besoins pouvant parfois fortement varier des besoins d’un usager classique. L’importance étant principalement portée sur les moyens de communication, que ce soit la langue des signes ou le braille (4).

Il n’y a  cependant pas de réaction « type » ou de bonne réaction en particulier à adopter mais selon les cas et les formes de handicaps les médiateurs seront amenés à réagir différemment. L’accueil sera aussi différent selon le fait que la personne soit seule ou accompagnée. Par exemple: lorsque l’on engage une conversation avec une personne handicapée, il est préférable de traiter cette personne de manière normale. Ce n’est pas parce que cette personne a un problème au niveau physique ou mental qu’elle est moins intelligente que vous. Cela peut être très insultant de s’adresser à ces personnes en parlant fort ou lentement. De plus, il ne vaut mieux pas les infantiliser (4).

Dans le cas des personnes atteintes d’un handicap physique, il est conseillé de ne pas avoir de réaction particulière, ou d’essayer de leur venir en aide par pitié (par exemple: essayer de pousser une personne en chaise roulante). On vérifie simplement que l’infrastructure de la bibliothèque est équipée des dispositifs adaptés, par exemple: des portes automatiques, une rampe d’accès ou même encore un ascenseur et que le passage dans la bibliothèque soit accessible. Dans le cas des personnes atteintes d’un handicap sensoriel, un accueil personnalisé sera recommandé par un bibliothécaire, car celui-ci sera plus long et plus ciblé. Le but premier sera d’identifier la demande de l’usager, de l’accompagner et le guider dans sa recherche, dans le cas d’une personne malvoyante, on lui lira les titres des ouvrages. Les cas cités ci-dessus, seront, la plupart du temps, des personnes se rendant individuellement dans l’institution. Et dans le cas des personnes atteintes de déficience intellectuelle, le but premier sera de les amener à une autonomisation totale dans la bibliothèque. Mise à part dans des cas précis, les médiateurs seront la plupart du temps en contact avec des groupes d’adultes. Ceux -ci vont entreprendre, via tout un système d’actions, de revenir par eux-mêmes à la bibliothèque au fur et à mesure. Le premier boulot du bibliothécaire-documentaliste sera donc d’identifier le handicap du futur public en contactant les institutions s’occupant des personnes handicapées mais aussi de mettre en place les différentes séries d’actions d’autonomisation avec les éducateurs et accompagnateurs spécialisés. On s’assurera que le bibliothécaire et l’éducateur sont bien présents lors de l’accueil prévu. Il y a divers dispositifs mis en place pour permettre aux publics empêchés de mieux appréhender l’environnement qui les entoure. La mise en place de signalétique de couleurs est un des meilleurs exemples (4).

Il existe des institutions autres que le CRA qui accueillent les publics empêchés telles que l’Œuvre Nationale des Aveugles (l’ONA), en Belgique. Les missions principales de l’ONA consistent à  permettre aux publics aveugles et malvoyants de vivre en autonomie et « sensibiliser la population, les professionnels et les pouvoirs publics aux réalités du handicap visuel. »(5) Cette institution propose des livres et romans en braille aux lecteurs. Dans le but d’inclure les enfants aveugles, l’ONA développe également des jeux de société et de plateaux qui jouent sur leurs autres sens (6).

Comme le dit Megan Cottrel, de nombreuses bibliothèques à travers les États-Unis ont adapté leurs animations et leurs « heures du conte » aux enfants autistes. Les bibliothécaires permettent ainsi à des enfants de profiter d’activités qui leurs seraient normalement inaccessibles à cause de leur handicap. Ces activités permettent également aux parents de mieux vivre le fait d’avoir un enfant autiste, ce dernier devenant plus ouvert au monde extérieur (7).

Il est important de voir que la médiation culturelle adaptée est une thématique sérieuse que l’on ne peut se permettre d’approcher de façon insouciante. Le colloque “La Médiation en bibliothèque : l’Affaire de Tous?”, abordait de nombreuses façons différentes de pratiquer la médiation en bibliothèque publique. Bien que la majorité des ateliers traitaient de la médiation numérique, l’atelier de Stéphane Dessicy intitulé “Médiation sociale en bibliothèque” traitait des façons dont un médiateur se devait d’accueillir et d’intégrer les différents publics désireux de profiter des institutions publiques. Il est cependant nécessaire de faire attention à la discrimination positive, accorder trop d’attention aux publics empêchés risquerait de provoquer chez les autres usagers un sentiment de délaissement (8).

De manière générale selon l’Université Laval, voici cinq conseils pour optimaliser nos réactions face à une personne atteinte d’un handicap :

  • « Écoutez attentivement. Ne présumez pas automatiquement que votre aide est requise. Lorsqu’elle s’est adaptée à sa déficience, une personne ne demande bien souvent de l’aide que lorsque nécessaire.
  • Offrez votre aide sans l’imposer, en demandant à la personne ce dont elle a besoin. Quelquefois, les personnes ayant une déficience trouvent difficile de demander de l’aide. Elles ont peur d’être un fardeau. Lorsque vous offrez votre aide, faites-le de façon précise et concrète.
  • Favorisez les communications franches et honnêtes.
  • Essayez de voir davantage le potentiel que les limitations de la personne: tout le monde y gagnera!
  • Encouragez la personne à utiliser ses capacités, tout en résistant à l’envie de la surprotéger. Quelquefois, on peut se montrer attentif ou attentive et apporter un soutien en étant simplement présent ou présente pour l’autre. »(9)

Article écrit par : DURIEU, Romain ; FOUCART, Alexis ; GHEYSENS, Laura ; GREGOIRE, Judith ; VANDEPUTTE, Éléonore

Bibliographie

(2) ASSOCIATION ÉCARTS D’ARTS. “Médiation culturelle adaptée” [en ligne]. In Ecarts d’arts. Mise à jour le 15 avril 2017 [consulté le 18 avril 2017]. Disponible sur le Web: <http://ecartsdarts.com/mediation-culturelle-adaptee/>

(7) ASSOCIATION PROFESSIONNELLE DES BIBLIOTHÉCAIRES ET DOCUMENTALISTES (APBD). « La médiation en bibliothèque : l’affaire de tous ! » In association professionnelle des bibliothécaires et documentalistes. La médiation en bibliothèque : l’affaire de tous. Colloque du 7 mars 2016, Haute École Paul-Henri Spaak, catégorie sociale (Bruxelles)

(4) Bibliothèque Départementale de la Sarthe. « Accueillir les publics handicapés à la bibliothèque » [en ligne]. In Biblio.Sarthe.fr. Mise à jour s.d. [consulté le 17 avril 2017]. Disponible sur le Web: <http://www.bds.cg72.fr/iso_upload/Handicap_0.pdf>

(8) COTTREL, Megan. « Storytime for the Spectrum, Libraries add services for children with autism » [en ligne]. In American Libraries . Mise à jour le 1 mars 2016 [consulté le 17 avril 2017]. Disponible sur le Web: <https://americanlibrariesmagazine.org/2016/03/01/sensory-storytime-spectrum-libraries-add-services-for-children-with-autism/>

(1) ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE DES SCIENCES DE L’INFORMATION ET DES BIBLIOTHÈQUES (ENSSIB). « Questions? Réponses! » [en ligne]. In Enssib . Mise à jour le 26 mars 2013 [consulté le 17 avril 2017]. Disponible sur le Web: <http://www.enssib.fr/node/133645>

(3) JULES, Caroline. «Bien accueillir les publics handicapés : l’indispensable transversalité conservation–médiation» [en ligne]. In Conservation-restauration et médiation culturelle. Publié le 23 mars 2011 [consulté le 18 avril 2017]. Disponible sur le Web: <http://www.cultureaccessible.fr/medias/files/17930554communication-tourcoing-caroline-jules-pdf.pdf>

(5) LŒuvre Nationale des Aveugles (ONA). LŒuvre Nationale des Aveugles [en ligne]. Mise à jour le 8 mai 2017 [consulté  le 8 mai 2017]. Disponible sur le Web : <http://ona.be/>

(6) TOUZAN, Stéphanie. «Les usagers déficients intellectuels en bibliothèque». Bulletin des bibliothèques de France (BBF). septembre 2009 [consulté le 18 avril 2017], n° 5, p. 49-52. Disponible sur le Web : <http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2009-05-0049-011>. ISSN 1292-8399.

(9) FOURNIER, Anne-Louise et TREMBLAY, Daniel. «Comment réagir?» [en ligne]. [consulté le 19 mai  2017]. Disponible sur le Web : <http://web.archive.org/web/20160514014111/www.aide.ulaval.ca/situation-de-handicap/textes-et-documents/comment-reagir/>